Genealexis

Histoires d'hier et d'aujourd'hui...

Après cette longue pause, le temps pour moi de laisser passer les vacances, la rentrée, la Toussaint, le passage à l'heure d'hiver et malheureusement, les attentats du 13 novembre 2015, je propose que nous reprenions ensemble nos découvertes historico-généalogiques en faisant, pour ce premier article de la saison 2015-2016, connaissance avec un cousin par alliance de mon arrière-grand-père.

Des paragraphes entiers ne seraient pas suffisants pour rendre hommage à l'homme dont je vais vous parler aujourd'hui. Le héros de mon histoire s'appelle Alfred. Il est né le 29 janvier 1898 à Semur-en-Auxois, une ville de Bourgogne qui aurait été bâtie par Hercule à son retour d'Espagne, et est le fils d'Alphonse FROIDUROT et Marie Blanche GIRARDOT. Après la guerre, le 9 août 1919 à Dijon (Côte-d'Or), Alfred épouse Lucienne ARNOULD, la cousine de mon arrière-grand-père Robert ARNOULD (le pompier, mais c'est une autre histoire que je vous raconterai peut-être un jour). Ensemble, ils vivent successivement à Bétheniville en 1924, Troyes en 1927, Nice en 1929, Antibes en 1930, Semur en 1939 et de nouveau Antibes en 1939.

Acte de naissace d'Alfred.

Alfred a tout juste 17 ans quand, le vendredi 2 juillet 1915 à Dijon, il s'engage comme volontaire pour la durée de la guerre au 17e Régiment de Dragons. Comme beaucoup de poilus, Alfred passe de régiment en régiment au grès des affectations: le 2e Régiment de Zouaves (en février 1916), le 3e Régiment Mixte de Zouaves (en juin 1916), le 1er Régiment de Zouaves (en octobre 1917) et enfin le 3e Régiment de Zouaves (décembre 1917). Il est plusieurs fois récompensé pour sa bravoure comme par exemple le 30 avril 1917, où il est dit qu'employé comme coursier, il s'est dépensé dans compter du 17 au 21 avril 1917 et n'a jamais hésité à traverser les terrains battus par l'artillerie ennemie pour transmettre les ordres qui lui étaient confiés ou le 20 août 1918 où il est dit qu'agent de liaison, [il] s'est dépensé sans compter pendant les journées des 8 et 9 août 1918, parcourant un terrain difficile battu par les balles. Le 28 août 1918, le jeune FROIDUROT est même blessé au genou droit par un éclat d'obus.

Ses "exploits", je pense que vous me pardonnerez le terme, n'empêche pas Alfred d'être condamné par le conseil de guerre du 28 septembre 1917 à six mois de prison avec sursis après avoir été reconnu coupable de désertion à l'intérieur par temps de guerre, avant d'être amnistié par la loi du 24 octobre 1917. Toutefois, le décret du 8 décembre 1933 lui accorde la Médaille Militaire et la décision du 13 octobre 1936, la Croix du Combattant Volontaire (voir illustration ci-dessous).

La Croix du Combattant Volontaire.

Je sais que jusque là, son parcours est celui de tant d'autres, celui d'un soldat membre d'une génération que l'on a sacrifiée sur l'autel du dieu Mars. Aussi, je vais continuer un peu mon histoire. Quand la Seconde Guerre Mondiale éclate le 3 septembre 1939, Alfred FROIDUROT est un commerçant domicilié à la cité ouvrière d'Antibes dans Alpes-Maritimes. Il rejoint les Forces Françaises de l'Intérieur (F.F.I.) et est arrêté le 9 août 1944 par la Gestapo cannoise à la suite de l'arrestation de Marcel NEYDORFF. La Gestapo avait choisi la Villa Montfleury, située 42 boulevard Montfleury, comme siège. Dans les caves du sous-sol, elle y avait aménagé quatre cellules qui étaient chacune fermée par une grille. Le couloir qui permet d'accéder à ces cellules était fermé par une barrière métallique.

La villa Montfleury

C'est dans l'une de ces cellule qu'est emprisonné et torturé Alfred au cours de cet été 44. Il y est assassiné avec 7 autres résistants au sous-sol de la villa Montfleury le 15 août 1944, parmi ceux-ci figurent Jean-Baptiste ALBERTINI, Concetta BIACCA, Gustave François Gaston BINY, Pierre Raymon CHALMETTE, Georges KRENGEL, Marius MARTINI et Hyppolite SEGURAN. Leurs noms sont inscrits sur la stèle commémorative de la Villa Montfleury à Cannes.

La villa Montfleury

Alfred, quant à lui, est reconnu mort pour la France et est inhumé au cimetière communal de Rabiac à Antibes. Le 14 septembre 1960, il est fait chevalier de la Légion d'Honneur à titre posthume.

Dossier pour sa Légion d'Honneur

Le plus émouvant à mes yeux, je sais que certains diront que je suis glauque, c'est que j'ai pu trouver une photographie présentant Alfred et ses 7 compagnons fusillés et décédés le 15 août 1944 dans les caves de la villa cannoise et publiée dans le journal L'Ergot n°15 (21 décembre 1944). Je ne mets pas le document ici par respect pour lui et sa famille, mais il est facilement trouvable sur une encyclopédie en ligne bien connu...