Genealexis

Histoires d'hier et d'aujourd'hui...

Album d'ancêtres

Je pourrais sans aucun doute écrire des dizaines de pages sur la personne dont je vais vous résumer la vie aujourd’hui, mais Joël MOYAUX l’a très bien fait dans son article “Un curé à Quarouble à l’ époque révolutionnaire : François Éloi Duez (1755-1825)” (voir sources). Aussi, je vais me contenter de maladroitement résumer, pour aller à l’essentiel.

François Eloi DUEZ, né le 25 juin 1755 à Quarouble dans le Nord, est le fils légitime de Jean Baptiste DUEZ et de Marie Reine MONTAY, mes ancêtres de la génération n°9. Après des études au séminaire de Beuvrages (Nord), il prend l’habit de religieux au sein de la communauté des Grands Carmes de Metz le 31 juillet 1777, et y fait un an de noviciat. Le 7 aout 1778, il est admis à la profession. Il reçoit la prêtrise des mains de François Charles de Velbrück, évêque de Liège, le 19 février 1780. Ses supérieurs l’envoient alors 7 ans au couvent de Baccarat, dans le diocèse de Nancy, où il exerce le ministère de prédication.

 

Acte de baptême d'Eloi
(source : Archives Départementales du Nord) 

Quand la Révolution Française éclate, et suite au décret de l’Assemblée Nationale du 13 juillet 1790, il doit choisir s’il reste fidèle ou renonce à la vie de communauté. Il répond le 9 mars 1791 qu’il a l’intention de retourner dans sa famille à Quarouble. Il y est élu curé constitutionnel en mai par les électeurs du district de Valenciennes réunis dans l’église Notre Dame-la-Grande.

 

Notre-Dame La Grande
(source : Archives Municipales de Valenciennes) 

Pour la petite histoire, Notre-Dame-la-Grande, est une église de Valenciennes qui avait été construite à l’initiative de Richilde de Flandre et de Hainaut et de son fils Baudouin II, dans le but de remplacer la petite chapelle où se déroulait le culte envers Notre-Dame du Saint-Cordon. Consacrée en 1086, elle est dépouillée de son contenu et vendu comme bien national en 1798. En mauvais état, elle est lentement démantelée. J’ai essayé de la localiser en comparant les sources. Pour ce que j’ai compris, sa façade était située à l’angle de la rue Notre Dame et de la Place du 8 mai 1945.

François Eloi est décédé le 2 juillet 1825 à Quarouble, une stèle lui rend hommage dans l’église.

La stèle en hommage à François Eloi DUEZ

 

Depuis quelques mois (qui a dit plusieurs années ?) je vous promets un article sur Auguste MOREAU-DESCHANVRES, un peintre qui a vécu à Saint-Saulve, seulement voilà, pour l’illustrer un peu, je voudrais aller faire un petit tour au Musée de Valenciennes pour y prendre quelques photos.

En attendant, je vous propose de parler d’un sujet qui est presque lié à l’actualité : L’alcool. Si vous êtes un habitué de BFM ou des réseaux sociaux, vous n’êtes pas sans savoir que janvier a été le mois “sans alcool”. Je ne vais pas lancer un débat afin d’essayer de savoir qui est pour et qui est contre, mais disons simplement qu’il faut avoir en tête que l’alcool serait un peu comme la cigarette, un fléau de notre société. On aurait alors pu profiter de cette période qui suit les fêtes pour se sevrer.

Publicité de Jules Chéret (1895)

Bref.

Il y a quelques mois, dans un article intitulé “Règlements de comptes au Corbeau”, je vous ai raconté comment Eva QUINTIN avait “tué” son époux violent et quotidiennement sous l’emprise de l’alcool. Il avait finalement été établi lors d’un réquisitoire du procureur au tribunal de Douai le 28 novembre 1934 qu’elle craignait pour sa vie et qu'elle était dès lors en état de légitime défense. En cherchant un peu plus dans l’histoire de cette famille, j’ai découvert qu’Adolphe AMAND, le beau-père d’Eva avait lui aussi été victime de son amour pour l’alcool. De vous à moi, il avait sûrement ses raisons, peut-être était-ce un moyen d’oublier les longues journées passées au font de la mine.

Né le 9 août 1855 à Elouges (dans le Hainaut belge), Adolphe AMAND est le fils légitime d’Adolphe et Marie Reine VALLEE. Il est issu d’une famille qui, dans l’état actuel de mes recherches, est implantée en Belgique depuis le XVIIe siècle. Très tôt, Adolphe part pour la fosse comme son père et son grand-père avant lui. Le 20 novembre 1875, il épouse à Dour Antoinette BROUETTE qui est d’un an son aînée. Si je me base sur les lieux de naissance de leurs 7 enfants, il semble que le couple ait pas mal bougé entre la Belgique, le Nord et le Pas-de-Calais : Marie est née à Dour en 1876, Adolphe à Liévin en 1877, Antoinette à Dour en 1880, Rosa à Liévin en 1883, Marie Rose à Douai en 1888, Henri à Hornu en 1890 et enfin Adolphine à Quiévrechain en 1893.

Un article de presse issu de l’Écho de la Frontière du 21 janvier 1893, nous raconte qu’Adolphe a été retrouvé mort gelé sur la route. Le journalise suppose qu’il serait tombé, ivre. Adolphine, la dernière de ses enfants est née le 26 juin de la même année, 5 mois après de décès de son papa. Elle est décédée à l’âge de 7 jours.

Echo de la Frontière du 21 janvier 1893
(source: Archives Municipales de Valenciennes)

Note : Le slogan qui sert de titre à l’article date des années 30, il s’agit d’une publicité réalisée par Cassandre où on voit un homme rieur et buveur disant “Dubo, Dubon, Dubonnet”.

On a tous rêvé, un jour ou l’autre, de se trouver une parenté avec un oncle d’Amérique. Dans l’imagination collective, on l’imagine riche, texan, et ayant fait fortune dans le pétrole ou dans l’élevage de bétail. On s’imagine déjà recevant la lettre recommandée d’un notaire où on nous annonce qu’après des années et des années de recherches, on a retrouvé en vous son seul héritier. Si ça se trouve, vous avez déjà prévu le coup en nommant vos enfants John Ross, Bobby et Pamela. Méfiez-vous car les Ewing sont bien placés pour vous dire que ça peut déchirer les familles les plus unies.

Un riche texan

Quand y pense, ce serait oublier ce cousin du XVIIe siècle qui était forgeron dans un petit village à cheval sur une rivière et qui travaillait comme un forçat pour nourrir sa famille, se serait oublier son fils, âgé d’une dizaine d’années, qui allait aider son père tous les matins. C’est également le moment où on pourrait penser à la cousine Madeleine qui a eu une dizaine d’enfants et qui vivait dans un coron du nord de la France. Pourtant on a tous, un jour ou l’autre, cherché à établir un lieu avec une personnalité connue. Je ne sais pas trop l’intérêt que les généalogistes, moi le premier, y trouvent. Je ne sais pas vraiment s’il s’agit d’une volonté de se faire mousser ou simplement de la curiosité du chasseur d’ancêtre qui est en nous. Dans tous les cas, je me suis prêté au jeu, et en comparant mes données avec celles disponibles sur Geneastar, j’ai pu me trouver deux cousins « célèbres ». Il me reste plus qu’à faire les vérifications d’usage en vérifiant en vérifiant les données.

Le premier vous sera certainement inconnu, il se nomme Alfred DANHIER. Fils légitime de Pierre Joseph Louis DANHIER et Eléonore ROGER. Il est né le 5 avril 1867 à Dour (Belgique) où il est décédé le 19 aout 1943.

Alfred DANHIER

En Wallonie, il est surtout connu pour avoir été un syndicaliste et homme politique membre du Parti Ouvrier Belge (P.O.B). Dans sa commune natale, il est successivement conseiller communal (1904), échevin (1907), avant d’être élu bourgmestre en 1921 puis sénateur provincial du Hainaut de 1919 à 1936. Surnommé le « Bâtisseur », il pose la première pierre de la Maison du Peuple au Hameau de Trichères (en 1923) et la première pierre de la Salle des Fêtes (en aout 1928).

La maison du peuple au hameau de Trichères à Dour

En réalité, je dois vous avouer que j’ai un peu triché car je ne suis pas parent avec Alfred mais plutôt avec son épouse, Thémire AMAND, à laquelle il s’est uni le 13 novembre 1897. Thémire est née à Dour le 7 juillet 1870 et est la fille légitime d’Adolphe AMAND et Emilie JEANMOTTE. Alfred et Thémire auront 5 enfants : Jean (né en 1900), Georges (né en 1902), Maria (née en 1904), Léonie (née en 1906) et enfin Edmond (né en 1908). Je vais vous passer les détails de ma parenté avec elle, pour faire simple, nos ancêtres communs sont un couple ayant vécu entre la fin du XVIIIe et le début du XVIIIe : Alexis Silvestre AMAND (1681-1743) et Marie Claude ROBERT (1690-1756), qui sont respectivement mes sosas 1024 et 1025.

On reste dans le monde politique avec le second cousinage dont je vais vous parler et dont j’ai découvert l’existence il y a tout juste quelques semaines : Arlette LAGUILLER.

Arlette LAGUILLER (1974)

Je vais rester assez flou car je ne pense pas avoir la capacité d’écrire des lignes sur une personnalité politique qui est encore vivante. Le site Politique.net la décrit toutefois comme née en 1940, au sein d’une famille ouvrière aux Lilas en banlieue parisienne. Après son BEPC, elle doit quitter l’école dès l’âge de 16 ans et entre au Crédit lyonnais où elle exerce la profession de mécanographe. De 1974 à 2007, elle se présente 6 fois aux élections présidentielles sous les couleurs de Lutte Ouvrière.

Nos ancêtres communs sont Jean-Baptiste GRAIN (vers 1753-1838), marchand de vaches, et Madeleine CARPENTIER (vers 1751-1829), un couple qui a vécu à Villers-Guislain (Nord) entre la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle. Ils ont la particularité d’être plusieurs fois mes sosas : 1006 et 480 pour Jean-Baptiste, 1007 et 481 pour Madeleine. Si vous n’êtes pas à l’aise avec la numérotation de sosa, disons qu’ils sont chacun deux fois mes ancêtres car leurs descendants se sont mariés entre eux.

L’histoire que je m’apprête à vous raconter aujourd’hui aurait pu servir de base à une enquête d’Hercule POIROT. Je l’imagine déjà arrivant en gare de Valenciennes, traversant la petite place, il se serait dirigé vers Grand Hôtel où une chambre était réservée à son nom depuis quelques jours. A bord d’une traction noire, la police locale l’aurait emmené, via la route qui mène à Mons, à Quiévrechain, à quelques pas de la frontière avec la Belgique. Le voyage rythmé par le chaos de la route pavée et par la cloche du tramway lui aurait fait traverser Saint-Saulve, Onnaing, puis Quarouble via le carrefour que l’on nomme les 4 pavés (ou les 4 chemins selon les sources).

 

L’arrêt des 4 chemins, à Quarouble
(source : Archives Municipales de Valenciennes)

Sa première étape aurait sans doute était la voisine d’Eva. Elle l’aurait invité à s’assoir, à la fois gênée et fière de la simplicité de sa vie. Elle lui aurait proposé une tasse d’un café allongé à la chicorée comme il est de coutume dans le nord de la France, puis Hercule serait allé rendre visite à la famille de la victime. La ville qu’il aurait découverte est une ville minière du Nord de la France comme le bassin minier en compte des dizaines. Il aurait sans doute croisé des enfants, peut-être même mon grand-père, jouant dans la rue. Le plus anglais des détectives belges aurait beaucoup écouté et beaucoup observé. Comme à son habitude, il n’aurait pas vraiment interrogé les personnes mais plutôt cherché à les comprendre et à les faire parler sans qu’ils s’en rendent vraiment compte.

En réalité, tout commence à Flénu, un village du Hainaut belge situé à quelques kilomètres de Mons. Eva Maria Emilia QUINTIN y voit le jour le matin du 9 mai 1882, fille légitime de Pierre, un garde convoi, et de Pauline DERNONCOURT. A 19 ans, elle épouse Adolphe AMAND, un mineur de 5 ans son ainé. Dans l’état actuel de mes recherches, le couple a eu 14 enfants repartis entre 1902 et le début des années 30. Je ne vais pas vous dresser ici la liste des enfants du couple, mais juste préciser qu’Adolphe (leur fils, né en 1902) est mon arrière-grand-père.

 

Eva Quintin entouré de sa famille
(source : Archives Familiales)

Ce 10 juillet 1934, Adolphe (l’époux d’Eva, né en 1877) n’a pas dessoulé depuis 3 jours, pour tout dire, il était même ivre au moment de son départ pour le boulot. Comme à son habitude, il avait injurié sa femme, et cette fois, il l’avait même tiré par les cheveux. Le soir venu, il avait réitéré ses violences envers la mère de ses enfants avant de repartir au cabaret. Adolphe est connu dans le quartier sous le surnom de « La Brouette », une allusion aux nombreuses fois où il fallait le ramener chez lui dans une brouette car il était ivre mort. A son retour à leur domicile de la rue du Corbeau, Adolphe est plus ivre que jamais, Eva de son côté, est en train de préparer la soupe pour sa famille quand il se lève furieux et comme envahi par la rage, il s’avance vers Eva qui prise de panique, lui jette sur le corps le contenu bouillant du seau de soupe lui occasionnant des brûlures dont la gravité causera la mort d’Adolphe à l’hôpital de Saint-Amand dix jours plus tard (le 20 juillet).

 

Extrait du Grand Echo du Nord du 26 juillet 1934
(source : BNF / Gallica)

A la suite d’un réquisitoire du procureur au tribunal de Douai le 28 novembre 1934 au cours duquel Adolphe AMAND est décrit comme un homme "très mal noté", qui "s'enivrait presque tous les jours" et était "violent et méchant (…) battait et violentait journellement sa femme qui ne répondait ni à ses insultes, ni à ses violences", la cour décide "qu'il résulte que si la dame QUNTIN Eva veuve AMAND s'est livré à des violences sur son mari, c'est parce qu'elle craignait pour sa vie et qu'elle était dés lors en état de légitime défense.".

Eva est décédée le 5 décembre 1965 à Baisieux (Belgique) à l’âge respectable de 83 ans.

 

Extrait de La Croix du 13 décembre 1934
(source : BNF / Gallica)

Eva Quintin (à droite) et sa voisine
(source : Archives Familiales)

Sources :

- La croix du 13 décembre 1934 (BNF / Gallica)
- Le Grand Echo du Nord du 26 juillet 1934 (BNF / Gallica)
- L’Egalité de Roubaix-Tourcoing du 12 décembre 1934 (Bibliothèque Municipale de Roubaix)
- Le Journal de Roubaix du 19 janvier 1935 (Bibliothèque Municipale de Roubaix)
- Archives départementales du Nord (Pour l’état-civil et le jugement)
- Archives d’Etat en Belgique (Pour l’état-civil)

Nestor CANONNE tient une place particulière parmi mes ancêtres, il fait partie des premières personnes sur lesquelles je me suis plongées quand j’ai repris mes recherches après la pause généalogique que j’avais dû faire pendant mes études. Par exemple, la première personne dont j’ai cherché la tombe dans un cimetière, c’était lui, la première fois que j’ai parcouru les rues d’une ville pour essayer de retrouver la maison où un de mes ancêtres étaient mort, c’était lui aussi. Il fait partie des ancêtres qui ont une place particulière dans mon cœur, à telle point que quand je parle de lui avec ma mère, nous avons pris l’habitude de le surnommer affectueusement Papi Nestor.

Nestor est né à Anzin (à côté de Valenciennes dans le Nord) le 19 février 1867, fils légitime de Nestor, verrier, et Joséphine MARÉCHAL. Paradoxalement, pour un ancêtre que j’ai dit être un de mes préférés, c’est quasiment tout ce que je sais sur sa vie, outre le fait qu’il ait pas mal bougé au cours de sa vie, au point même de rencontrer son épouse en Belgique, à une soixantaine de kilomètres (à vol d’oiseau) de chez lui. Le 24 juillet 1889, il est forgeron et épouse à Couillet (à côté de Charleroi en Belgique) Marie DUCHÊNE, une couturière de quelques mois sa cadette. Deux ans plus tard, le 25 mars, naît Berthe Aline, la mère de mon arrière-grand-mère.

Nous sommes en 1910, il est 21h30. L’avenue de Condé, qui sert de frontière entre les communes de Valenciennes et Anzin, est une rue pleine d’activité, on y trouve des commerces, des logements ouvriers, l’église Sainte-Croix et un estaminet.

En s’approchant un peu, et en fermant les yeux un court instant, on peut facilement imaginer à quoi ça ressemble : quelques tables autour desquelles des hommes, certains encore vêtus de leur « habits du dimanche », discutent, rient, peut-être même qu’on y parle politique, syndicalisme et socialisme. Dans le fond de la salle, un homme fume une pipe en terre comme celles que l’on fabrique à Onnaing, un petite ville située à quelques kilomètres de là. Un peu plus loin, on y déguste une des nombreuses bières brassées dans la région et on joue aux cartes en pariant le peu d’argent que l’on gagne. Bref, un dimanche soir comme les autres, dans un estaminet comme les autres. Soudain pourtant, le ton monte entre deux hommes : Nestor qui a 43 ans et Alfred VIN (l’oncle de son gendre) couvreur rue des Moulineaux, qui est de 6 ans son aîné. Comme pris de colère, Alfred attrape la chope qui est posée devant lui et, l’alcool aidant sans doute, tente de frapper Nestor à la tête, qui a heureusement le temps de parer le coup avec son bras. On peut imaginer la panique des gens qui assistent à la scène à la vue de la grande quantité de sang perdue par Nestor, qui, selon le rapport du Docteur RELLE qui l’avait pansé, avait une petite artère de sectionnée au poignet droit.

Alfred sera condamné 2 mois plus tard à 15 jours de prison pour coups.

Extrait du Grand Echo du Nord du 17 aout 1910
(source : BNF/Gallica)