Genealexis

Histoires d'hier et d'aujourd'hui...

Album d'ancêtres

C’est toujours difficile de choisir la personne dont on va parler dans un article. Faut-il la choisir pour son originalité ? Pour la quantité d’informations que l’on possède ? Peut-être même qu’il s’agit d’un individu qui nous tient à cœur à cause d’un parcours particulier ? Il arrive aussi que parler de cette personne soit une sorte d’obligation, comme pour rendre un hommage posthume. C’est le cas de la famille COUEZ dont je vais vous parler aujourd’hui. Vous comprendrez un peu plus loin qu’en rédigeant cet article, j’ai eu l’impression d’être pigiste pour « Le Nouveau Détective », à moins que d’avoir été possédé un instant par l’esprit de Pierre Bellemare, dont je ne possède malheureusement pas les talents de narrateur ?

L’auberge de La Houlette était située à Bry, à quelques pas de la frontière avec entre la France et la Belgique. Un article paru dans le journal « Le Temps » du 21 novembre 1905 précise que l’auberge contient quatorze lits et que l’on peut mettre dix chevaux dans ses écuries. Elle est également décrite comme un lieu qui reçoit beaucoup d’étrangers, à cause de sa situation à l’entrée du pays, et sert de refuge pour les « ci-devants » et les ennemis notoires de la république. Un rapport de 1795 conseille même de faire surveiller l’établissement qui est soupçonné de conspiration et de trouble royaliste, il ne faut pas oublier comme nous sommes en pleine révolution, à quelques années du Premier Empire.

l'auberge de la Houlette sur une carte postale ancienne

L'auberge de la Houlette

En cette fin de XVIIIe siècle, l’auberge est tenue par Jean-Philippe COUEZ (frère de Marie Joseph COUEZ, ma sosa 851). Il y vit avec sa femme Joséphine BOULVIN, ses six enfants et Hubert MOREAU, un médecin qui est décrit comme un bon vivant de 64 ans. Jean-Philippe approche les 50 ans. En complément de son activité d’aubergiste et avec l’aide de ses deux fils, il parvient à cultiver quelques lopins de terre, achetés peu à peu sur ses économies. Tout était pour le mieux jusqu’à ce soir de Saint-Cécile, le 22 novembre 1795, quand Moneuse et une dizaine d'hommes attaquent l'auberge pour détrousser ses occupants.

D’après les recherches que j’ai mené (Archives Départementales du Nord et Albert JOTTRAND du Barreau de Mons), Antoine MONEUSE serait né à Douai, paroisse Saint-Aubin, le 3 mars 1769. Je précise qu’il s’agit des recherches que j’ai menées car le débat autour de son lieu de naissance est toujours en cours. Si le livre « Le Nord pour les nuls » mentionne Saint-Waast-la-Vallée comme lieu de naissance, sans doute une confusion due au fait que la famille Moneuse a vécu quelques temps dans ce village, la plupart des documents que j’ai pu consulter indiquent comme lieu de naissance Marly, pourtant je n’ai pas trouvé de trace de sa naissance au Archives Départementales. Le seul Moneuse qui est né à Marly est Martin, frère d’Antoine.

A la mort de son père en 1779, il disparait pour, selon toute vraisemblance, rejoindre la bande du brigand SALEMBIER qui perpétue des méfaits dans la région lilloise puis dans le Hainaut à la fin de la révolution. MONEUSE était ce que l’on appelait un chauffeur. Il s’agissait du nom que l’on donnait à des bandits qui attaquaient les maisons isolées et torturaient les victimes en leurs chauffant les pieds dans le but de leurs faire avouer où elles cachaient leur argent.

acte de baptême d'Antoine Moneuse, le bandit

Acte de baptême d'Antoine MONEUSE

Je vous passe les détails de cette macabre soirée, mais le bilan est lourd de neuf morts, dont le couple de tenanciers, leurs six enfants : Séraphine (13 ans), Jean-Philippe (22 ans), Renelter (12 ans), Désiré (11 ans), Marie-Josèphe (16 ans), une petite fille âgée de 22 mois nommée Marie Sylvie et le docteur Moreaux. Les corps sont décrits comme meurtris par les coups répétés des armes blanches (sabres, haches, ...), témoignage de la violence des faits le rapport des médecins stipule que dans les bras de sa sœur de 16 ans, la petite dernière de 22 mois fut retrouvée avec la partie supérieure du bas-ventre tranchée, les viscères sortants.

Si vous avez le cœur bien accroché, vous pouvez poursuivre la lecture de mon article avec cet extrait du rapport des médecins Emile Joseph CRAPPEZ et François WALLERANT :

"Dans la cuisine, nous avons trouvé la nommée Jeanne-Joséphine Boulvin, femme du dit Couez, âgée de 45 ans, à qui nous avons remarqué un coup de poignard à la partie supérieure de la poitrine, du côté droit, mortel ; un autre coup de pointe au sein gauche, aussi mortel ; trois autres coups, aussi mortels, au bas-ventre, à la gauche du nombril, les viscères sortant et les dits coups pénétrants ; un coup de pointe dans l’aine droite ; un coup de tranchant au coronal ; un coup tranchant à la partie inférieure du cubitus et le doigt indicateur coupé ; un autre tranchant au poignet, avec fracture ; enfin, un autre coup tranchant à la partie moyenne du même bras.

Dans la même cuisine, avons trouvé une fille nommée Séraphine, âgée de 13 ans, à qui nous avons remarqué deux coups de sabre sur l’occipital, à deux travers de doigts de distance ; ensuite le crâne séparé et le reste de la tête fracassé ; un autre coup de pointe dans l’aine droite ; un coup tranchant au cubitus, séparant l’articulation ; un autre coup tranchant sur la main gauche ; enfin un autre coup tranchant sur l’épaule droite et l’articulation coupée.

Passant la boutique et entrant dans un cabinet, étendue sur un lit, avons trouvé une fille nommée Marie-Josèphe, âgée de 16 ans environ, à qui nous avons remarqué un coup de pointe à la partie supérieure de la poitrine, au-dessus du sein droit, mortel ; un autre coup de tranchant coupant la main gauche; un coup de tranchant sur l’épaule droite ; trois coups de tranchant à la partie supérieure de l’occipital à un travers de doigt ; un coup tranchant traversant l’oreille droite ; enfin un coup de poignard sous l’aisselle gauche."

Antoine-Joseph Moneuse fut quant à lui jugé à Mons le 20 brumaire an VI de la République, après 9 mois d'instruction. Il fit appel de l'arrêt de mort prononcé à Mons et fut jugé à nouveau auprès de la cour d'appel du Nord à Douai où son jugement fut confirmé. Le 18 juin 1798, Moneuse mourut guillotiné sur la place de Douai. Lui et ses complices montèrent à l’échafaud vêtus d’une chemise rouge, la tenue destinée aux assassins et empoisonneurs.

portrait d'Antoine Moneuse

Portrait d'Antoine Moneuse

A l’heure où j’écris ces lignes, le débat est toujours ouvert: Moneuse était-il un Robin des Bois ou un horrible brigand qui massacrait ses victimes ? Etait-il l’auteur de tous les crimes dont il a été accusé ?

Au cours de mes recherches, j’ai rencontré toutes sortes d’individus, ayant exercé toutes sortes de métiers. Parmi eux, Théodore DRUART, qui est né le 22 juillet 1847 dans un village belge répondant au nom de Stambruges, était marchand de sable. Théodore est le fils d’Albert (boucher) et de Marie Rosalie MASSART (journalière), tout deux originaires de Stambruges. Théodore n’est pas un de mes ancêtres, mais ce que nous appelons un « collatéral ». En clair, il s’agit qu’une personne qui n’est ni un ascendant, ni un descendant. Par exemple, votre cousin ou votre neveux sont des collatéraux.

marchands de sable sur une carte postale ancienne

Nous connaissons tous l’histoire du marchand de sable. Dans la culture occidentale, c’est un personnage fabuleux qui laisse tomber du sable sur les yeux des gens pour les endormir. Dans de multiples langues, les ouvrages de référence ne paraissent pas fixés quant au caractère unique ou multiple du marchand de sable. Mais elle a aussi été combinée avec une expression : avoir du sable sous les yeux utilisée au XVIIIe siècle.

Plus prêt de nous, Le Petit Campenaire nous racontait en octobre 1994 comment certains gamins de familles pauvres vendaient du sable blanc extrait de la Garenne.  

 

article de journal sur les marchands de sable  
(cliquez pour agrandir)

Il y a quelques années, ma tante paternelle a rencontré (un peu par hasard je crois) une personne qui porte le même nom de famille que nous et qui se trouve être le frère d’Alain AMAND, un pianiste qui après être rentré en 1979 au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, obtient entre autres le Premier Prix de Musique de Chambre en 1982 et le Premier Prix de Piano à l’unanimité en 1984. Comme Proust et sa madeleine, la mention de ce nom a réveillé en moi des souvenirs. Fabien, aujourd’hui trombone solo à l’Opéra de Paris, m’avait demandé quand nous étions au collège si Alain, qui était alors son professeur au Conservatoire de Valenciennes, était un de mes parents. Je me souviens que j’avais répondu oui, sans même avoir pris la peine de poser la question à mon grand-père qui m’a expliqué cette parenté par la suite en mentionnant toute une série de frères et de cousins mais avec le temps, j’ai tout oublié.

 

madeleine de proust

  

Alors ? Cousin ou pas cousin ?

Il y a quelques mois, je suis parti à la découverte des ancêtres d’Alain pour déterminer si il existe une parenté entre ma famille et la sienne. Je dois avouer que j’ai longtemps hésité avant de commencer cette recherche car d’un côté il y a ma tante qui me semble convaincu que cet “Amand” est un de nos cousins, de l’autre il y a mon grand-père qui m’avait dit qu’Alain était mon cousin. Mais au-delà de mes états d'âmes, je pense que c’est mon devoir de généalogiste que de rétablir la vérité.

Pour ne pas embêter les gens avec des questions auxquelles ils n’ont pas toujours envie de répondre (surtout quand on sait qu’Alain est décédé en 1995) j’ai voulu partir de zéro, avec juste sous les yeux une date et un lieu de décès. Mon plus beau clavier entre les mains, j’ai envoyé une demande d’acte de décès à la mairie de Paris. En étudiant cet acte, j’ai ainsi pu trouver l’acte de naissance et le nom des parents d’Alain. J’ai utilisé la méthode connu de tous les généalogistes et qui permet de remonter les générations d’actes en actes. Ses ancêtres sont essentiellement des bateliers, je ne vous cacherais donc pas qu’ils étaient très mobiles, sont nés, se sont mariés et sont décédés au fils de l’eau. J’ai ensuite pu relier Alain à une petite base de données à propos des bateliers de Condé que j’avais commencé à faire il y a un peu moins de 10 ans.

 

Les quais à Condé sur une carte postale ancienne

Les quais à Condé-sur-Escaut

Dans l’état actuel des recherches, Alain AMAND ne cousine pas avec moi, je n’ai pas encore trouvé les 2 frères qui permettraient de relier nos deux généalogies. Pour résumer simplement, mes ancêtres travaillaient sous terre, les siens sur l’eau. Vous pouvez retrouver l’étude que j’ai réalisée sur les ancêtres de mon “cousin pianiste”, en cliquant sur le lien ci-dessous.

Voir la généalogie d'Alain AMAND

 

Un de mes ancêtres, valenciennois de naissance, s’appelait Albert REGHEM et est décédé à l'Hôpital des fortifications de Dresde le 7 juillet 1813 d'une forte fièvre. J’ai essayé de localiser cet hôpital mais les fortifications ont été détruites sous l’ordre du  roi Frédéric-Auguste à partir de 1815. J’ai juste pu localiser l’hôpital des hommes et l’hôpital du Saint-Esprit, reste à savoir s’ils ont été utilisés comme hôpitaux militaires pendant l’occupation de la ville par les troupes de Napoléon en 1813. A moins qu’il ne s’agisse d’un hôpital de campagne qui aurait été établi provisoirement ?

 

acte de baptême de Albert Reghem

Acte de baptême d’Albert
(source : Archives Départementales du Nord) 

 Albert REGHEM était né à Valenciennes le 27 mai 1774, fils de Charles Imbert et de Marie Barbe LOIRE, deux valenciennois vivants rue Saint François, Paroisse Saint-Géry. Il est baptisé dès le lendemain par Philippe Joseph BOMAIRE, vicaire de Saint Gery. Le 31 décembre 1797, il épouse Marie Thérèse COLMONT. Quelques mois plus tard, le dimanche 5 mai 1799 (16 floréal an VII), le couple aura une fille (mon aïeule) à laquelle ils donneront les prénoms de Marie-Barbe mais ça, c’est une autre histoire !

 

eglise saint gery de valenciennes d'après un dessin de simon le boucq

L’ancienne église Saint-Géry vers 1650 
(d'après Simon Le Boucq, Prévôt de Valenciennes)

J’ai toutefois un petit soucis car sur son acte de décès, le nom de sa mère est devenu Marie BARDOIT alors que sur tous les autres documents que j’ai pu trouver (son acte de baptême et son acte de mariage) il est bien indiqué que sa mère s’appelle Marie Barbe LOIRE. Si vous avez une info, n’hésitez pas à me laisser un petit commentaire. Pour ma part, je pense qu’il s’agit juste d’une erreur de retranscription du décès. Autre petite chose intéressante, le père d’Albert était le cocher de l’abbé de Saint-Jean.

Sur ce document, il est aussi précisé qu’Albert était sergent et soldat d'ambulance dans l’infanterie. Au début des guerres révolutionnaires, dans les années qui précédent le Premier Empire, les soins aux blessés, quand ils ne souffrent pas de carences extrêmes, sont souvent  inexistants.  Seule la garde impériale, quelques années plus tard, disposera du meilleur service de santé possible. Des ambulances volantes seraient apparues en 1797, à l'initiative de Jean Dominique LARREY, chirurgien en chef de la Grande Armée.

 

dessin d'une ambulance de Larrey pendant le premier empire

Une ambulance de Larrey

Vêtus de gris jusqu'à ce qu'en 1809 on donne un uniforme de coupe militaire, les soldats d'ambulances sont alors formés en 10 compagnies de 125 hommes. Ils portent un chapeau noir, puis un shako noir sans cordon, à plaque de cuivre jaune avec le numéro de la compagnie, veste blanche, culottes blanches, guêtres et chaussures noires. Leurs grades sont : Centenier, commandant de compagnie, Sous-Centenier, Sergent-major, Sergent et caporal. En 1812, le nouveau règlement leur donne la poche en long, supprime le fusil et la giberne est remplacée par un sac à compartiments pour contenir les objets de 1er secours pour les blessés. Ils ont également une tenue de travail (Bonnet de police et tablier). Ils sont encadrés par les Médecins, les Chirurgiens et les Pharmaciens de 1ère, de 2ème ou 3ème classe et détachés suivant leur classe auprès des Etats-Majors, des Régiments, des Ambulances ou des Hôpitaux Militaires. La Garde possédait un Service de Santé particulièrement bien organisé, en raison de l'attention spéciale qu'accordait l'Empereur à Larrey. Larrey avait alors divisé son ambulance volante en 3 divisions comprenant chacune 75 infirmiers à pied, 36 infirmiers à cheval et 60 conducteurs.

 

uniformes des soldats d'ambulance

uniformes des soldats d'ambulance

 

 

Ressources:

Biographie de Dominique-Jean LARREY sur le site internet Medarus
Uniformes et Armes de Fred et Liliane FUNKEN
Histoire ecclésiastique de la ville et comté de Valenciennes par Sire Simon Le Boucq, Prévôt de Valenciennes (1650)

 

Le plus vieil ancêtre sur ma branche patronymique est Alexis Silvestre AMAND.

Il voit le jour vers 1681, fils légitime de parents que je n'ai pas encore trouvé. Mais selon un de mes cousins belges, (Joseph Charles Albert AMAND, webmaster de http://www.amand.be) il serait le fils de Pierre Joseph AMAND.

Alexis était Chaufournier. Le chaufournier est, dans la production de la chaux vive, l'ouvrier conducteur du four à chaux. Par extension il désigne l'exploitant d'un four à chaux. Dans le langage des mines et carrières, chaufournier désigne aussi l'exploitant industriel d'une entreprise de production de chaux. En Egypte, à l'époque pharaonique, les chaufourniers remployaient le calcaire utilisé dans la construction des temples, des palais ... Mais là, on s'écarte un peu du sujet.

coupe de fonctionnement d'un four à chaux

Fonctionnement d'un four à chaux

Il s'unit avec Marie Claude ROBER(T) le vendredi 8 mai 1711 dans la ville de Mons.

"Monsieur Vergnies, prêtre, a conjoint en mariage dans la ville de Mons, Silvestre Alexis Amand et Marie Claude Robert, tous deux de la paroisse de Thulin.  Compasteur Philippe François Jean en a donné la commission au dit Vergnies.  Furent témoins Joseph Moreau, chapelain de Ste Wandru et Marie Joseph Baugraud."

acte de mariage AMAND - ROBERT à mons

Acte de mariage d'Alexis

Ce couple aura neuf enfants :

  • Catherine née en 1712.
  • Nicolas né en 1715.
  • Jacques né en 1716.
  • Alexis né en 1718.
  • Thérèse née en 1719.
  • Jean Joseph né en 1721.
  • Etienne né en 1723.
  • Jean né en 1729.
  • Jean né en 1731 (mon ancêtre).

Alexis S. AMAND est décédé le vendredi 4 janvier 1743, à l'âge de 62 ans, à Thulin et inhumé "au cimetière le cette église"

Acte de décès d'Alexis

Acte de décès d'Alexis

Note: dès que possible, je mettrai en ligne des copies un peu plus lisible des actes.